Que sera sera II

A  PROPOS DE NICE, DE NEUCHÂTEL ET DE L’ESPACE ENTRE LES DEUX.

« Nice-Neuchâtel eut été à l’époque héroïque du cyclisme, la plus grande des classiques alpestres. Près de six cents kilomètres en deux étapes, passant d’abord tous les plus grand cols (La Bonette, l’Izoard, le Montgenèvre, le Mont Cenis, l’Iseran, le St. Bernard, le Grand St. Bernard, le Champex) avant de fondre le long des lacs jusqu’à Neuchâtel. En cette paire de jours, vous auriez vu ce que vous auriez vu, ça aurait remis Bordeaux-Paris à sa place…

Je ne suis pas certain qu’il en soit de même en Art et en Cyclisme, mais il se peut qu’en l’un comme en l’autre, les parcours les plus inattendus puissent être les plus intéressants. Et voilà donc que deux structures, le CAN à Neuchâtel et La Station à Nice, se sont rencontrées, au fil des ans, ici et là, puis se sont plu, puis ont planifié de se revoir, de faire la route dans un sens d’abord, dans l’autre ensuite. Il ne reste plus qu’à passer quelques cols et qu’à s’échanger.
C’est peut-être plus au modèle libertin qu’au cyclisme, que la relation entre les deux structures emprunte car c’est bien d’un genre d’échangisme dont il est question, échangisme qui se substituerait ici à la pratique curatoriale. Il s’agit pour l’une et l’autre des structures de quitter son propre territoire et d’aller chantonner dans le décor de l’autre. Et c’est ainsi que se construisent et s’agencent deux expositions qui n’en forment probablement qu’une seule en deux étapes. L’exposition collective est un exercice attendu, parfois ennuyeux, oeuvre d’une décision somme toute autoritaire, l’échangisme expositionnel est une activité amusante et surprenante qui fait se rencontrer des pratiques et les transforme, et cela va sans dire dans ce cas précis, peut déplacer des montagnes.

Il n’y a évidemment pas de vainqueur dans cette classique alpestre, mais deux expositions qui se conçoivent et se construisent conjointement. Ce qui caractérise cette posture, c’est un abandon successif de l’un à l’autre, l’échangisme expositionnel, c’est cette petite ritournelle que l’on siffle en quittant son chez-soi. Reste à voir ce que l’on va voir. Però… Que sera sera. »


Jean-Baptiste Ganne